Jurisprudence – fissuration de murs intérieurs et plafonds / implantation altimétrique de la maison trop basse – caractère décennal
Une maison a été édifiée en Brière en 2007 par un constructeur de maisons individuelles. Il s’agissait de construire une maison de plain-pied avec combles aménageables. Après livraison, la cliente a fait aménager la moitié de l’étage en grenier accessible. Plusieurs années après, elle a constaté plusieurs désordres dont l’apparition de fissures sur tous les plafonds et sur les cloisons en cueillie de plafonds, ainsi que des remontées d’humidité en soubassement de murs extérieurs (avec une trace d’humidité apparue à l’intérieur dans le salon début 2013). La cliente a fait appel aux avocats de Polythetis qui ont fait désigner un expert judiciaire par le Président du Tribunal en 2011. Le rapport d’expertise a été déposé en 2013.
Entre-temps, le constructeur CMI avait déposé le bilan. Aucune transaction n’a pu alors intervenir avec l’assureur dommages-ouvrage (également assureur décennal du constructeur), ni avec les sous-traitants du constructeur CMI pour les lots charpente et cloisons sèches, ainsi que leurs assureurs. Le Tribunal de Grande Instance de St-Nazaire a alors été saisi. L’enjeu était notamment de faire reconnaître que les problèmes relevaient de la garantie décennale pour obtenir une indemnisation à 100 % du montant des travaux de réparation, puisque dans ce cas les assureurs ne peuvent opposer à la victime la franchise contractuelle de leur police d’assurance, ce qui est d’autant plus important lorsque l’entreprise assurée a déposé le bilan…
Dans son jugement du 2 juin 2016 (RG n°14/00721), le Tribunal considère, s’agissant des fissurations intérieures : « Techniquement, le solivage est insuffisant. Le plâtrier a posé des plaques dans un matériau différent de celui prévu au contrat de construction, mais c’est un système équivalent, reconnu comme tel et régulièrement objet d’un avis technique. Le problème vient de ce que le système, comme celui prévu au contrat, imposait des contraintes de rigidité qui n’ont pas été respectées ici. D’où des mouvements avec fissurations évolutives, qui imposent une reprise (…) Le désordre, en son ensemble, porte atteinte à la solidité et à la destination de l’ouvrage par la fragilité de la charpente en combles et des fissurations en plafonds et cueillies évolutives. Il engage donc la responsabilité décennale des trois intervenants » (constructeur CMI et sous-traitants charpentier et plâtrier).
Le Tribunal condamne par conséquent les assureurs responsabilité décennale obligatoire des entreprises et l’assureur dommages-ouvrage à indemniser à ce titre la propriétaire de la maison à concurrence de 23.100 euros TTC conformément au chiffrage des travaux de réparation proposé par l’Expert judiciaire.
S’agissant ensuite des remontées d’humidité extérieures, le Tribunal considère : « Il appert que la maison est un peu trop enfoncée par rapport au profil du terrain et que la situation rend nécessaire un drainage (…). L’Expert ne cite pas directement d’atteinte à la solidité ou à la bonne propriété à destination de la maison. Toutefois, sa conclusion technique qu’un drainage est nécessaire sous-entend ce point, la maison étant vulnérable à des entrées d’eau, déjà observée en 2013, ce qui caractérise une impropriété à destination actuelle ». L’assureur dommages-ouvrage est par conséquent condamné à payer à la propriétaire de la maison la somme de 2.200 euros TTC correspondant au coût de réparation chiffré par l’Expert judiciaire. E.Kierzkowski-Chatal